La mobilité est aujourd’hui au centre de nombreuses discussions. Elle est en effet une thématique globale influant sur différents aspects au sein des territoires, au niveau collectif, mais également pour chaque individu. La mobilité présente plusieurs composantes (économique, sociale, environnementale…) à différentes échelles (nationale, régionale, locale). Le transport routier prédomine et est une source importante de pollution de l’air et de dégradation du climat. Il constitue l’un des principaux émetteurs d’oxyde d’azote et de particules et est aujourd’hui le principal responsable des émissions de CO2.
En Auvergne-Rhône-Alpes, le secteur des transports routiers est responsable d’environ 55% des émissions d’oxyde d’azote et de 17 % des émissions de particules. De nombreuses personnes, en particulier les résidents les plus proches des voies de circulation les plus importantes, sont exposées à des niveaux de pollution supérieurs aux valeurs réglementaires pour le dioxyde d’azote.
Le transport des personnes et des marchandises est actuellement un défi qui relève de la santé publique, de la protection de l’environnement (dans une démarche croisée air, énergie et climat), mais également de l’aménagement du territoire ainsi que de la planification. Atmo Auvergne-Rhône-Alpes propose de vous fournir les éléments indispensables à la compréhension des enjeux de la mobilité en lien avec la qualité de l’air.
Sommaire :
Le transport routier, une source importante de pollution de l'air en Auvergne-Rhône-Alpes
Zones de proximité trafic = zones les plus exposées
Transport et mobilité : quels leviers d’actions pour une meilleure qualité de l’air ?
Le transport routier, une source importante de pollution de l'air en Auvergne-Rhône-Alpes
La qualité de l'air est étroitement liée aux substances émises dans l'atmosphère, soit de manière naturelle, soit par les activités humaines. Sur le territoire régional, le secteur des transports et en particulier le transport routier est le principal émetteur de NOx, dont plus de 90% des émissions sont imputables aux véhicules Diesel. C’est également le secteur responsable d'une part importante des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) et de particules fines.
Véhicules particuliers, poids lourds et utilitaires sont les principales sources de pollution de l’air et du climat
En effet, parmi les différentes sources, des disparités existent au niveau des émissions selon le type de véhicules et les polluants émis dans l’atmosphère. Les émissions de polluants atmosphériques des bus et autocars, ainsi que des deux-roues motorisés représentent moins de 5 % des émissions de particules PM10 et d’oxydes d’azote, laissant la très grande majorité des émissions aux voitures particulières, véhicules utilitaires et poids lourds.
Afin de limiter la pollution de l’air et du climat liée au transport, il convient donc de mettre en place des leviers d’actions orientés conjointement autour de ces trois types de véhicules.
Il semblerait intéressant de proposer des leviers d’actions en particulier sur les poids lourds, qui, malgré le fait qu’ils représentent moins de 10 % des distances parcourues en Auvergne-Rhône-Alpes, sont responsables de 17 % des émissions de NOx et de 29 % des émissions de particules PM10
Véhicules Diesel anciens : principaux émetteurs d’oxyde d’azote et de particules en suspension
Les normes actuelles visent à réduire drastiquement les émissions de polluants dans l’air lors de l’utilisation des véhicules. Cependant, le renouvellement du parc automobile français ne peut pas se faire du jour au lendemain et de nombreux véhicules anciens circulent toujours sur les routes régionales.
De même, suivant la motorisation, la part des émissions de certains polluants est très variable.
Si l’on considère la norme Euro 6 en vigueur actuellement, les véhicules à motorisation essence présentent des émissions de dioxyde de carbone (CO2) plus élevées que les véhicules à motorisation Diesel. Pour les particules fines, l’écart s'est fortement réduit avec les normes les plus récentes. En revanche, les véhicules Diesel sont responsables d’une part prépondérante des émissions d’oxydes d’azote (NOx) du secteur des transports (plus de 90 %).
Les véhicules Diesel, depuis la norme Euro 4 pour les poids lourds et la norme Euro 5 pour les véhicules légers, sont équipés de filtres à particules visant à réduire fortement les émissions primaires de poussières dans l’air. L’impact sur les émissions de PM est très significatif puisqu’il permet un abattement en masse supérieur à 95%. De plus ce système mécanique de filtration est efficace dès le premier kilomètre effectué à froid. A noter que l'’équipement sur les véhicules essence sera également nécessaire pour respecter la valeur limite en nombre imposée par la prochaine norme Euro (6c).
Cependant, les véhicules légers Diesel étant encore très majoritaires dans le parc de véhicules, et tous les véhicules n’étant pas équipés de filtres à particules, ils demeurent les principaux émetteurs de particules fines.
Ainsi, si le renouvellement accéléré du parc est bénéfique sur les émissions de polluants atmosphériques, le choix de la motorisation (essence ou Diesel) représente lui aussi un levier pertinent pour réduire les émissions liées aux transports. Depuis 2014, après de nombreuses années de baisse, les ventes de véhicules essence repartent à la hausse avec une accentuation depuis 2015.
Zones de proximité trafic: les zones les plus exposées
Les émissions liées au transport routier ne sont pas homogènes au sein d’un territoire, ni même dans le temps. En Auvergne-Rhône-Alpes, malgré une amélioration notable des concentrations moyennes de dioxyde d’azote entre 2007 et 2016 ( -21 % en 10 ans), 50 % des stations de mesure de proximité automobile présentent un dépassement de valeur réglementaire en 2016.
Le centre des grandes agglomérations et le voisinage immédiat des axes routiers sont particulièrement touchés par la pollution liée au trafic automobile, et notamment l’exposition au dioxyde d’azote.
Pour ce dernier, la responsabilité des transports dans le niveau d’exposition des populations est très marquée. En situation de proximité routière, plus de 80% de la concentration de NO2 est lié aux émissions des transports, dont 50% directement lié à l’axe le plus proche. Ce qui signifie également qu’en situation de fond urbain le niveau de dioxyde d’azote est alors deux fois plus faible qu’en situation de proximité routière. Pour les particules en suspension PM10, les transports contribuent pour environ 1/3 aux niveaux de PM10.
Les niveaux élevés de polluants aux abords des axes routiers ont des conséquences non négligeables sur la santé. En effet, le projet Aphekom, coordonné par l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) de 2008 à 2012 dans 12 pays européens, et plus particulièrement dans 9 villes françaises confirme que le fait d’habiter à proximité du trafic routier augmente sensiblement la morbidité attribuable à la pollution de l’air.
Les résultats de cette étude mettent en avant que le fait d’habiter à proximité du trafic routier serait responsable d’une augmentation des pathologies chroniques respiratoires et cardiovasculaires chez l’adulte de plus de 65 ans et également d’environ 15 % des asthmes de l’enfant. De plus, pour les habitants des grandes agglomérations françaises, une baisse des niveaux moyens de particules en suspension PM2.5 à hauteur des seuils de l’OMS permettrait un gain de 5 à 7 mois d’espérance de vie.
Transport et mobilité : quels leviers d’actions pour une meilleure qualité de l’air ?
D’une manière générale, trois types d’approches peuvent être identifiées, mais également combinées, pour réduire les émissions de PM10 et de NOx du secteur des transports :
- La diminution du volume de trafic,
- L’accélération du renouvellement du parc de véhicules (en effet, les véhicules anciens sont plus « polluants » que les véhicules récents) et l’évolution vers des véhicules plus « propres »,
- L’optimisation des conditions de circulation (amélioration de la fluidité du trafic, optimisation de la vitesse de la circulation).
On peut rajouter à ces 3 approches l’éco-conduite, qui est également bénéfique à la réduction des émissions de polluants atmosphériques.
La diminution du trafic : pourquoi, comment ?
La diminution du volume de trafic permet évidemment de réduire les émissions de polluants atmosphériques. D’une manière générale, cet objectif peut être réalisé à l’aide de politiques de transports et d’urbanisation à long terme. Pour cela, plusieurs leviers sont possibles, comme :
- Favoriser une mobilité moins dépendante de la voiture particulière, en proposant et en mettant en place d’autres moyens de déplacements comme les modes doux (marche à pied, vélo…), les transports en commun, l’auto-partage, le covoiturage… Cette mobilité alternative à la voiture doit être accompagnée par des politiques locales favorisantes (plans de déplacements urbains…) ainsi que des campagnes de sensibilisation afin d’inciter au changement.
- Optimiser le trafic de marchandises en développant les plateformes multimodales ainsi que le transport ferroviaire, fluvial, mais également en optimisant les plateformes logistiques. De même, une mise en œuvre de centres de distribution urbaine (CDU) optimisant les tournées dans les centres-villes et utilisant des véhicules adaptés au milieu urbain et peu polluants est une solution permettant de limiter les émissions dans les grands centres urbains. De tels centres ont déjà été mis en place en Auvergne-Rhône-Alpes à Lyon, Grenoble, Annecy et Saint-Etienne notamment.
- Concevoir un urbanisme générant moins de besoins de déplacements, notamment en voiture, avec une politique d’urbanisme de proximité, et en particulier des services adaptés et multiples dans les centres-villes. Cet urbanisme est lié à différents plans comme les Schémas de Cohérence Territoriale (SCoT) ou encore les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU).
- Restreindre l’accès de certaines zones à tous les véhicules, dans l’objectif de créer des zones plus agréables et moins exposées à la pollution.
L’accélération du renouvellement du parc de véhicules vers des véhicules plus propres
Pour accélérer le renouvellement du parc de véhicules, il est possible de s’appuyer sur deux dynamiques, soit la restriction de circulation des véhicules les plus polluants, en permanence ou lors des épisodes de pollution, ou alors des incitations / pénalités financières qui permettent d’orienter vers des véhicules plus propres.
Les Zones de Circulation Restreintes (ZCR) :
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (article 13) a introduit la possibilité de créer des zones à circulation restreinte dans les agglomérations et les zones PPA. Ces zones sont délimitées par un arrêté qui fixe les mesures de restriction de circulation applicables et détermine les catégories de véhicules concernés dans le but d’améliorer la qualité de l’air et de diminuer l’exposition de la population à la pollution atmosphérique. En France, Paris et la Métropole Grenobloise sont pionniers en la matière. Ces ZCR se basent, pour catégoriser les véhicules, sur les certificats de qualité de l’air « Crit’Air » mis à disposition depuis le 1er juillet 2016.
Focus sur la classification des véhicules :
Tous les véhicules routiers sont concernés : deux roues, trois roues, quadricycles, véhicules particuliers, utilitaires, poids lourds dont bus et autocars. Le certificat qualité de l’air donne le droit à des avantages pour les véhicules les moins polluants. Ainsi, suivant les mesures mises en place, l’automobiliste peut :
- bénéficier de modalités de stationnement favorables ;
- obtenir des conditions de circulation privilégiée ;
- circuler dans des zones à circulation restreinte (ZCR).
Afin de limiter au mieux les émissions de polluants, il convient de déterminer le dimensionnement optimal entre le niveau de restrictions et le périmètre concerné.
Grenoble : précurseur en Auvergne-Rhône-Alpes
Depuis le 1er janvier 2017, une préfiguration de Zone à Circulation Restreinte (ZCR) pour les véhicules de transport de marchandises (véhicules utilitaires légers et poids lourds) est mise en place sur le centre-ville élargi de Grenoble. Cette mesure constitue une des mesures phares du plan d’actions pour une logistique urbaine durable dans la Métropole Grenobloise.
L’objectif est d’encourager l’utilisation de véhicules moins polluants en s’appuyant sur les « Certificats de Qualité de l’Air ». Les véhicules utilitaires légers et les poids lourds sans Certificats de Qualité de l’Air (VUL immatriculés avant le 1er octobre 1997 et PL immatriculés avant le 1er octobre 2001) ne sont plus autorisés à circuler dans le centre-ville élargi de Grenoble, du lundi au vendredi de 6h à 19h, tout au long de l’année.
Atmo Auvergne-Rhône-Alpes a mis à disposition des parties prenantes les éléments d’aide à la décision concernant la qualité de l’air nécessaires à l’élaboration du dispositif et assure l’évaluation et le suivi de l’efficacité des actions mises en oeuvre.
Bonus / Malus écologique, Prime vélo, prime à la conversion…
Autre levier d’action ayant pour objectif d’accélérer le renouvellement du parc automobile français, les aides financières et les malus écologiques ! Ces aides ou pénalités se déclinent selon trois possibilités :
- Le malus écologique : à l’achat d’une voiture neuve, les véhicules émettant le plus de dioxyde de carbone sont pénalisés par un malus à payer.
- Le bonus écologique vise à récompenser les véhicules émettant moins de 61 g de CO2 par km, soit les véhicules 100 % électriques (6000€ si moins de 20g CO2 / km) ou les véhicules hybrides rechargeables (1000€ si moins de 20g CO2 / km). Depuis le 1er janvier 2017, aucun bonus n’est possible pour les véhicules hybrides classique, essence, Diesel. qui ne sont pas électriques ou hybrides rechargeables.
- La prime à la conversion : le remplacement d'un véhicule Diesel immatriculé avant le 1er janvier 2006 par un véhicule électrique majore de 4000 € le bonus, et de 2500 € pour l’achat d’un véhicule hybride rechargeable.
D’autres incitations financières sont disponibles pour les véhicules à moteurs électriques à 2 ou 3 roues. Depuis le 19 février 2017 et jusqu’au 31 janvier 2018, l’Etat accorde une aide pour l’acquisition d’un vélo électrique neuf n’utilisant pas de batterie au plomb pouvant atteindre 200 €.
L’optimisation des conditions de circulation
Un autre levier d’action pour limiter les émissions de polluants dans l’atmosphère consiste à optimiser les conditions de circulation, en particulier en centre-ville, mais également de limiter les vitesses hors agglomérations pour rouler à une vitesse optimale permettant les émissions les plus faibles.
La vitesse optimale de circulation pour les émissions de polluants atmosphériques est d’environ :
- 70 km/h pour les véhicules légers
- 90 km/h pour les poids lourds
En centre-ville, la fluidification du trafic et la limitation de la congestion permettent de réduire les phases d'accélération et de freinage et constituent un moyen de diminuer les émissions de polluants.